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Stéphane Juge
Guide
bleu illustré des Alpes françaises.
Dauphiné-Savoie.
Briançonnais – Pelvoux – Queyras
– Maurienne – Tarentaise – Mont-Blanc
– Beauges – Chartreuse – Vercors
– Grandes-Rousses – Gapençais
– Embrunais. (2e édition)
Description de l'exemplaire (Voir : Notes sur la description des ouvrages)
Notes sur l'ouvrage
Un guide des Alpes, bien illustré, où le Dauphiné est particulièrement bien représenté, et plus précisément la Grave et le massif de la Meije, à cause de l'origine familiale de l'auteur et du parti pris d'une approche plus personnelle, voire subjective, de la description touristique. Ce guide est plus particulièrement destiné aux alpinistes et randonneurs (le terme n'était pas alors utilisé), plutôt qu'aux touristes intéressés par l'histoire et les monuments. Il contient en particulier un long récit d'une ascension de la Meije par Stéphane Juge.
Contenu de l'ouvrage :
- Annonces pour des hôtels (2 p. non chiffrées)
- Faux titre (1 p. non chiffrée), avec au recto l'annonce
d'un guide, jamais paru : « En
préparation : le 2me volume
du Guide bleu des Alpes
françaises (Provence &
littoral) »
- Titre (p. 1)
- Abréviations (p.2)
- Dédicace à Georges Montorgueil (p. 3)
- Page blanche (p. 4)
- Planche photographique : La Grave (p. 5). Signée
en bas à droite « Rougeron-Vignerot
s.c. »
- Préface
(pp. 7-11), signée Henry Fouquier. Après des
généralités sur les voyages, la
découverte récente de la montagne et de la
nature, et sur l'intérêt des guides, il insiste
sur le caractère personnel du guide :
« vous avez mis légitimement à
contribution les travaux de vos devanciers, mais vous y avez
ajouté la note émue et personnelle, les
observations et les découvertes que vous avez faites vous
même sur les lieux. » Il ajoute ensuite
que ce guide permet de faire connaître
« des pays moins connus » comme
la Tarentaise, la Maurienne, le Gapençais, le Queyras, le
Pelvoux.
- Texte par Hector Pessard (p. 12), qui glorifie l'alpiniste
« robuste et sain chercheur d'au-delà »
alors que « pendant ce temps, le
dégénéré sent son organisme
trahir les maladives volontés de son
cerveau. »
- L'air des montagnes,
par Émile Gautier (pp. 13-16). Éloge de la
qualité et de la propreté de l'air des montagnes,
en particulier du point de vue de sa teneur en microbes.
- Nos Alpes,
par Adolphe Tabarant (p. 16). Poème. Dernier vers :
« Savoie et Dauphiné, puissants
guérisseurs d'âmes ! »
- Planche photographique (p. 17).
- Les Alpes
françaises (pp. 19-24). Texte liminaire de Stéphane Juge, dans
lequel, au-delà de
généralités sur les Alpes, il avance
deux idées qui l'ont guidé dans la
rédaction de son ouvrage. La première
est : « Ce livre est donc un
témoignage d'admiration affectueuse »
à la différence des déjà
nombreux autres ouvrages qui « se contentent
d'être historiques, descriptifs ou
scientifiques. ». Autrement dit, il revendique un
ton personnel. Ensuite, il veut s'efforcer « de
mettre en relief dans [son] incursion à travers
les Hautes-Alpes, l'Isère, la Savoie et la Haute-Savoie, ces
deux merveilleux massifs, les plus riches du monde en attractions, ceux
du Pelvoux et de la Tarentaise, trop méconnus tous
deux ». On verra que l'équilibre de
l'ouvrage entre les différents massifs en
sera affecté. On n'échappe
pas à une comparaison avec la Suisse.
- Conseils pratiques de
voyage (pp. 25-35). Contient un règlement des
guides. La planche photographique (p. 29) représente ses
deux guides habituels de La Grave : Louis Faure et Jules
Mathon. Il se fait aussi le défenseur du tourisme hivernal.
- Géographie
alpiniste (pp. 36-39), qu'il divise en
Bas-Dauphiné, Haut-Dauphiné et Savoie.
- Grandes routes et
itinéraires (pp. 40-122). Il ne
déroge pas à ce qui était le mode de
présentation des guides touristiques de l'époque
qui s'organisaient par routes. La description des routes
étant l'occasion de citer brièvement les
principales curiosités, dont certaines seront
développées plus largement dans la partie
suivante. Comme on le verra tout au long de l'ouvrage, le parti pris au
profit de tout ce qui concerne les Alpes dauphinoises et plus
particulièrement la vallée de la Romanche se note
aux nombreuses pages détaillées
consacrées à la route de Grenoble à
Briançon et plus spécifiquement le
tronçon Bourg d'Oisans-Briançon (pp. 84-90), avec
cette remarques personnelle : « J'ai fait
souvent cette route à pied, sans jamais m'en lasser. Les
mesquins soucis de la vie parisienne s'évanouissent
bientôt en présence d'un si magique spectacle.
J'étais conquis tout entier par l'admiration, et j'aurais
voulu pouvoir crier mon enthousiasme au monde. » (p.
84)
Grands centres
d'excursions (pp. 123-465). Dans cette deuxième
partie, descriptions à partir des centres de tourisme, pour
les 4 grandes régions : Dauphiné,
Haut-Dauphiné, Savoie occidentale, Savoie orientale. Les
deux premières régions représentent
plus de 200 pages alors que les 2 Savoies représentent
seulement 130 pages, preuve que ce guide est plus complet sur le
Dauphiné que sur la Savoie. Autre preuve, Chamonix a droit
à 19 pages quand La Grave est décrit sur 36
pages. Plus de 130 pages sont consacrées au seul
Haut-Dauphiné. Pour chaque centre, Stéphane Juge
s'attache surtout à décrire les excursions
possibles, des plus accessibles jusqu'aux ascensions
réservées aux alpinistes. L'aspect historique ou
monumental est souvent mis au deuxième plan. Il nous donne
aussi les tarifs des courses. C'est donc bien un ouvrage
orienté vers l'alpinisme et la randonnée (terme
qui n'était alors pas utilisé)
plutôt qu'au tourisme. Le chapitre consacré
à La Grave (pp. 187-22) est une vraie déclaration
d'amour à ce petit bourg et aux montagnes qui l'entourent,
dont la fameuse Meije. Pour illustrer l'ascension de ce sommet, il ne
donne rien moins que des extraits d'un article qu'il a
consacré à l'ascension de ce sommet (pp.
205-211). Il finit par : « La Meije,
vantée et idéalisée par
vingt poètes et artistes, a produit une véritable
secte de fanatiques : les « Meijistes ».
Elle doit être considérée comme la Madone des Alpinistes,
la Reine
la plus altière de tous les peuples de
sommets. » (p. 212) Cette partie est
illustrée de deux planches photographiques
représentant la Meije depuis la Grave et le Grand-Galibier.
Pour finir, dans cette partie, lorsqu'il parle de Villar
d'Arène, il apporte cette notation personnelle qui explique
aussi sa préférence pour cette
région : « L'auteur de ce guide
s'honore de descendre d'une vieille famille d'instituteurs de
Villard-d'Arène, dont plusieurs représentants
aujourd'hui exercent encore le professorat dans les
départements des Hautes-Alpes, de la Loire et du
Rhône. » (p. 195)
Renseignements
généraux. Hôtels – Magasins
– Voitures – Guides des principaux centres
d'excursions. Maisons recommandées. (p.
467-481).
Annonces commerciales (pp. 482-497), essentiellement pour des
hôtels.
Différentes tables, dont une table alphabétique
(index) (pp. 499-519)
Les 4 dernières pages non chiffrées sont des
feuillets pour prendre des notes.
Les deux cartes dépliantes in fine en couleurs
sont :
- Carte des voies
d'accès et des centres d'excursions du Dauphiné,
dressée par H. Duhamel et datée de 1894
- Carte
spéciale du Guide bleu des Alpes
françaises. Elle ne couvre que la Savoie.
Les 31 planches photographiques, bien qu'imprimée sur un papier spécial, sur une seule face, sont incluses dans la pagination. Certaines sont signées Rougeron-Vignerot s.c.
Maison
de La Grave (Les guides Louis Faure et Jules Mathon) |
La
Meije et ses glaciers (Vue de l'hôtel de la Meije) |
La
chaîne de la Meije (Vue du Grand-Galibier) |
Pour agrandir, cliquez sur les photos |
Les deux dernières planches
ont
été référencées
par Paul
Guillemin dans
son ouvrage La Meije dans l'image,
sous les numéros 169 et 170 : "Ils sont en
outre reproduits dans l'Album
du Guide bleu des Alpes Françaises, in-8
oblong." Autour de cet ouvrage, Paul Guillemin
référence aussi, en 1893 :
164. Pic de la Meije,
vu du Grand Hôtel de la Meije. Delfosse et
Carlier. Le dessin est de M. J. Ragot. Dans les épreuves du
Guide en préparation : Les
Alpes françaises, Guide illustré,
Dauphiné, Savoie, par Stéphane Juge.
Paris, librairie du Service central de la Presse, 2 vol. in-8°.
(Cette gravure n'a pas été publiée.)
et en 1894 :
172. Chaîne de la Meije (vue du Grand-Galibier).
Affiche du Guide
bleu des Alpes françaises, par
Stéphane Juge. Paris, Draeger et Lesieur.
La première édition de ce guide a paru en 1894, aussi publié par le Service central de la Presse, avec une pagination plus réduite de 457 pages et une reliure d'éditeur différente : reliure souple pleine basane bleue, tête dorée. Elle comporte déjà 31 planches photographiques, mais, semble-t-il, qu'une seule carte.
Cette annonce de parution montre bien l'accent mis sur les montagnes du Dauphiné. Elle a paru en 4e page d'un 4 pages publié par le Service central de la Presse suite à l’assassinat de Sadi Carnot en juin 1894. La parution est prévue pour le 8 juillet 1894.
Pour agrandir, cliquez sur la photo |
L'accueil critique dans les Alpes, dans le milieu alpiniste et, plus spécifiquement, dans le milieu des alpinistes dauphinois, a été mitigé. Ni l'Annuaire du Club Alpin français, ni l'Annuaire de la Société des Touristes du Dauphiné n'ont annoncé la parution du guide. Il est seulement référencé, sans commentaire, dans le Bulletin de la Société d'Études des Hautes-Alpes, année 1894. Stéphane Juge n'a pourtant pas ménagé ses efforts pour se faire admettre. Il adhère à la Société des Touristes du Dauphiné en mars 1893. Les bulletins de 1893, 1894 et 1895 annoncent ses ascensions. Malgré cela, dans l'Annuaire de 1896, il reçoit le coup de grâce, de façon assez indirecte. Dans une Bibliographie topographique de la région (pp. 291-316), son ouvrage est référencé p. 305. Ce n'est qu'au détour du commentaire sur le Guide du touriste en Savoie, de A. Weissen (p. 316), qu'un avis, sans appel, est donné : « Publication peu sérieuse, très supérieure toutefois au Guide-Bleu de S. Juge. » Une note précise (p. 291) : « Cette énumération, empruntée en partie au Guide du Haut-Dauphiné de Perrin, Duhamel et Coolidge, comprend également un grand nombre d'indications nouvelles que nous ont données avec une grande complaisance MM. Duhamel, Coolidge et Vernier. » Dans ce procédé un peu tortueux, faut-il voir la patte de Henry Duhamel ?
De façon moins
polémique, A. Raymann, dans son Evolution de l'Alpinisme
dans les Alpes Françaises, juge cet ouvrage.
Dans le chapitre
Ouvrages
généraux sur une région ou un massif
déterminé. – Guides. (p.
231), après
avoir fait l'inventaire des guides sur le Dauphiné, avec une
mention
particulière pour le Guide
du Haut-Dauphiné, et sur la Savoie, il termine
par :
« Plusieurs guides ont
paru dans les années suivantes. Mais tous, qu'ils aient nom
Guide bleu
des Alpes françaises de Stéphane
Juge, ou Guide
du touriste en Savoie
de A. Weissen (1889), ou Guide
du baigneur en Tarentaise par Laissus
(1894), sont sans grande valeur. Leurs renseignements sont souvent
insuffisants et parfois inexacts. » (p. 245)
Je n'ai trouvé qu'une
critique positive, celle de Paul Ginisty dans le numéro du 3
août 1894 de Gil
Blas (n°5372) :
« Pour
lui, c'est en France que reste M. Stéphane Juge, et c'est
quelque chose
comme un monument de piété — mais de
piété active — qu'il
élève aux
Alpes françaises, qu'il a parcourues dans tous les sens,
avec une
ferveur toujours nouvelle, car il a la passion de la montagne et il a
escaladé tous les sommets, toutes les cimes. Son ascension
du
redoutable pic de la Meige, le plus redouté des pics, fit
même quelque
bruit l'an dernier.
M. Juge est le plus convaincu, mais aussi le
plus engageant des alpinistes, et il trouve parfois une
véritable
éloquence pour exalter les joies particulières,
mêlées d'un légitime
orgueil, qu'éprouve l'ascensionniste parvenu,
après tant de fatigues et
de difficultés, au but qu'il s'était
proposé. Il y a une page célèbre
de Michelet où il dit que ceux qui se prennent corps
à corps avec la
montagne ne donnent pas la vraie raison de leurs efforts quand ils les
colorent de motifs scientifiques. Le réel, c'est qu'ils
montent pour
monter. M. Juge a vécu cette page-là, et il se
sert d'un mot qui me
paraît caractéristique quand il écrit
qu'il a pour les Alpes du
Dauphiné et de Savoie une admiration « affectueuse
».
On s'en
aperçoit bien à ce que les itinéraires
qu'il trace pour la conquête des
sites alpestres sont tout imprégnés de souvenirs,
les souvenirs de
campagnes d'un rude marcheur qui, le pic et le piolet à la
main, n'a
plus laissé de sommets inviolés. De là
la pittoresque description,
vivante et émue, des monts où il s'est
frayé un passage, parfois en
plein hiver. Car de la montagne M. Juge, poète en cela, aime
jusqu'aux
bourrasques, aux tourmentes, aux tempêtes de neige. Ce sont
de mâles et
fortifiantes jouissances que celles-là, nées de
sublimes spectacles!
On
commence à être un peu las des beautés
de la nature, « truquées » par
l'industrie des hôteliers. M. Juge nous dit, lui, les coins
inconnus de
nos régions montagneuses françaises, les
merveilleux panoramas point
préparés, les splendeurs non tarifées,
et c'est plaisir de le suivre —
fût-ce par la pensée, seulement, hélas
! Heureux ceux qui referont ces
excursions, auxquelles invite son livre, un des plus
sincèrement
vibrants qu'on ait écrit sur « nos »
Alpes! »
Lorsque l'on sait que Paul Ginisty
était un des contributeurs des textes introductifs de la
première édition, on comprend mieux. Puis, quand
on sait que Stéphane Juge dirigeait une agence de presse
parisienne, le Service
central de la Presse, on comprend encore mieux la
bienveillance des journalistes et la présence de nombreux
textes introductifs par des "publicistes" de l'époque.
En effet, Stéphane Juge a
sollicité de nombreuses personnalités pour des
textes d'introduction. Ce sont toutes des personnalités du
milieu de la presse parisienne de
l'époque :
- Octave Lebesgue dit Georges Montorgueil
(1857-1933) est un journaliste
et écrivain français. Il travailla
notamment à L'Écho
de Paris. Il
devint ensuite chef des informations à L'Éclair,
et enfin rédacteur en
chef au journal Le Temps
jusqu’à sa mort. Il dirigea à partir de
1900
L'Intermédiaire
des chercheurs et curieux. (Wikipédia).
- Henry Fouquier (1838-1901), est un journaliste, écrivain,
dramaturge et homme politique français
(Wikipédia).
- Hector
Pessard (1836-1895) : Journaliste, homme de lettres, critique
musical
et dramatique. - Directeur du Bureau de la presse au
ministère de
l'intérieur (1878). - Directeur du journal Le National (BNF).
- Émile Gautier (1853-1937) est un journaliste. Il
collabora à divers journaux, dont L'Écho de Paris
(Wikipédia).
- Adolphe
Tabarant (1863-1950) à Paris, est un journaliste,
écrivain et critique
d'art socialiste libertaire. Il a écrit de nombreuses
études sur les
peintres impressionnistes (Wikipédia).
Texte.
Références (Voir : Liste des sources et références)
Notice biographique de Stéphane Juge
Perret : 2413
« Un guide touristique sur les montagnes de la
Savoie et
du Dauphiné. Ce guide accorde une bonne place à
l'Oisans, et en
particulier à La Grave et à la Meije,
région d'origine de l'auteur ».
Il ajoute : « Stéphane Juge est
d'une célèbre famille originaire de La
Grave. » Ne cite que la première
édition.
Perrin : 313, pour la première édition.
BSEHA(B), 1894 : p. 276.
Raymann : 472
Pour la première édition (5 exemplaires
au CCFr) :
BNF :
8-LK1-279, BNF (Richelieu) : GE
FF-3748,
BMG :
V.28836, BAGNERES DE BIGORRE – BM (Fonds local) : LA
12 / 509, ANNECY –
BM (Fonds Savoie) : S G – 10
Pour la deuxième édition, un seul exemplaire au
CCFR : BMG : V.25995