Blason Dauphiné BIBLIOTHÈQUE DAUPHINOISE Armoiries Hautes-Alpes
ACCUEIL LISTE DES OUVRAGES LISTE DES PERSONNES CONTACT
PAGE THÉMATIQUE : Exploration du Haut-Dauphiné(Oisans/Ecrins)

J. Guérin
Docteur en Médecine; Professeur de Physique au Collége Royal d'Avignon; Conservateur et Bibliothécaire du Muséum CALVET; Médecin de la Maison Royale de Santé; Médecin honoraire de l'Hôpital Sainte-Marthe; Membres de plusieurs Académies et Sociétés savantes nationales et étrangères.

Mesures barométriques
suivies
De quelques Observations d'Histoire naturelle et de Physique, faites dans les Alpes françaises, et d'un Précis de la Météorologie d'Avignon.

Description de l'exemplaire  (Voir : Notes sur la description des ouvrages)

Avignon, Imprimerie de Guichard aîné, 1829
In-12 (136r x 83r mm), XVI-213-[3] pp. (la pagination en chiffres arabes continue la pagination en chiffres romains)
Mesures barométriques, Guérin : titre Mesures barométriques, Guérin : reliure
Pour agrandir, cliquez sur les photos

Notes sur l'exemplaire

Demi basane verte, dos lisse orné de filets et bandeaux, tranches jaunes mouchetées.

Notes sur l'ouvrage

Publication des nombreuses mesures d'altitude que Joseph Guérin a recueillies dans les départements du Vaucluse, de la Drôme, des Alpes de Haute-Provence et surtout dans les Alpes dauphinoises (Isère et Hautes-Alpes). L'ouvrage est complété d'observations météorologiques et d'autres considérations sur l'altitude.

Comme souvent à l'époque, au delà du propos initial, l'auteur enrichit son ouvrage de considérations sur des sujets très variés. La description précise de l'ouvrage en donne un bon aperçu  :

A Monsieur le Marquis de Fortia d'Urban (pp. V-VI) : Dédicace à ce célèbre érudit avignonnais qui est, entre autres, auteur d'un ouvrage sur le passage d'Hannibal par Montgenèvre.

Préface. (pp. VII-XVI) : L'auteur décrit l'objet de son livre, qui est de donner les mesures d'altitude qu'il a recueillies avec son fils au cours de ses séjours dans les Alpes du Dauphiné et de Haute-Provence. Son propos est de publier les résultats de ses mesures et non de faire œuvre de théoricien : "Naturellement éloigné de toute espèce de théorie et d'hypothèse, je n'ai cherché que des résultats" (p.13). Ces résultats ont été obtenus par des campagnes sur le terrain. Il n'a pas hésité à parcourir les montagnes du Dauphiné pour collecter ces informations. Il en retire une observation sur les Alpes du Dauphiné qui sera souvent reprise par la suite : " On ne saurait croire combien il est plus pénible et plus difficile de parcourir nos montagnes que celles de la Suisse et d'une partie de la Savoie. On y trouve que rarement un asile supportable ; et des guides peu exercés s'aventurent quelque fois dans des passages très-dangereux ou impraticables." (p. XI). Il inclut d'ailleurs dans son ouvrage le récit d'une nuit dans une bergerie à 2 500 m. d'altitude. Joseph Guérin est l'ancêtre de nos premiers alpinistes. On croit déjà lire les commentaires peu amènes des premiers voyageurs anglais sur nos régions. Cette préface se termine sur un Nota Bene qui précise quelques éléments sur les mesures et leurs précisions.

Chapitre premier. Nivellement barométrique de quelques routes. (pp. 19-28) : Ce sont les mesures d'altitude, exprimées en toises (1 toise = 1,949 m.), de quelques routes qui partent d'Avignon et couvrent le territoire de la Drôme, des Alpes de Haute-Provence, des Hautes-Alpes et de l'Isère. Par exemple, il mesure l'altitude de différents points sur la route d'Avignon à Turin par le Mont-Genèvre. Il donne 676 T. (1 317 m.) pour Briançon et 962 T. (1 875 m.) pour le Mont-Genèvre. Parmi les autres routes mesurées, la route de Grenoble à Gap par le col Bayard et la route de Grenoble à Briançon par le Lautaret (la "petite route"). Pour ce col, il donne 1 066 T. (2 078 m.), ce qui est un peu supérieur à l'altitude réelle : 2 057 m. Il donne l'altitude de l'extrémité inférieure du glacier d'Arsine, à 910 T., soit 1773 m. Il est difficile de savoir de quel glacier il parle exactement. C'est soit celui du Lautaret, soit celui du Casset, mais probablement pas celui qui s'appelle ainsi aujourd'hui. Quelque soit le glacier, cela donne une information intéressante du point où descendaient les glaciers dans les Hautes-Alpes lors du maximum glaciaire.

Chapitre II. Mesures barométriques de divers lieux. (pp. 29-42) : Dans le même esprit que le chapitre précédent, ce sont les mesures d'altitude, exprimées en toises, de 17 lieux dans l'Isère, les Hautes-Alpes, les Alpes de Haute-Provence et le Piémont (vallées cédées). Dans les Alpes dauphinoises, il évalue les altitudes des environs de Bourg d'Oisans, du Mont-de-Lans, de la vallée du Vénéon, du Valbonnais, du Valgaudemar, des environs de Gap, de la Roche-les-Arnauld, de Briançon, de Château-Queyras, de la vallée du Queyras. Au Mont-de-Lans, il donne la limite inférieure du glacier de Lans à 1 636 T. (3 188 m.), ce qui semble élevé, puisque identique aux altitudes actuelles du glacier vers les Deux-Alpes. Pour la plus grande hauteur du glacier de Lans, il donne 1 796 T., soit 3 500 m., ce qui correspond approximativement à l'altitude du Dome de la Lauze (3 568 m). De même dans le Valgaudemar, il mesure le col de Says (1 723 T. - 3 358 m.), l'Olan (1 980 T - 3 859 m.) et une montagne qu'il appelle l'Ozon à 2 100 T., soit 4 093 m. S'agit-il des Ecrins, vu depuis le col de Says ? Dans les environs de Briançon, il donne l'altitude du glacier d'Allefroide à 965 T., soit 1 881 m. Si on identifie ce glacier avec la langue terminale des glaciers Blanc et Noir, qui se rejoignaient alors, on voit bien que ils empiétaient largement sur le Pré de Mme Carle. Toutes ces mesures ayant été faites par Joseph Guérin lui-même, avec son fils, on constate qu'ils ont parcouru les Alpes dauphinoises en tous sens, n'hésitant pas à entre au cœur des massifs et probablement, d'affronter la haute montagne au col de Says, au pied des glaciers et peut-être même sur les glaciers, comme au Mont-de-Lans. Cela fait de  Joseph Guérin un des premiers explorateurs scientifiques du massif.

Chapitre III. Hauteur des villes et villages du Dauphiné et de la Haute Provence, élevés de plus de 600 toises sur le niveau de la mer. (pp. 43-47) :  Tous ces lieux se trouvent dans les Hautes-Alpes et les Alpes de Haute-Provence. La  liste se termine logiquement par Saint-Véran : 1 047 T. (2 041 m.)

Chapitre IV. Nivellement barométrique de quelques rivières. (pp. 48-54) : Relevés de l'altitude et de la pente moyenne le long du cours du Rhône, de l'Isère, de la Durance, du Drac, de la Romanche, du Vénéon, etc.

Chapitre V. Hauteurs de quelques villes, villages, cols et montagnes du département de Vaucluse, sur le niveau de la mer. (pp. 55-60).

Chapitre VI. Décroissement de la température atmosphérique sur les hautes montagnes. (pp. 61-75) : Considérations sur la baisse de la température en fonction de l'altitude, fondées sur des mesures prises au Mont-Ventoux. Il se réfère aux travaux de Humboldt et Saussure.

Chapitre VII. Température de l'intérieur des montagnes. (pp. 76-80) : Ces considérations sont fondées sur la température des sources, dont le détail est donné dans le chapitre suivant.

Chapitre VIII. Température des sources. (pp. 81-86) : Ces mesures, qui illustrent le chapitre précédent, couvrent toujours le même territoire d'investigation de l'auteur. Quelques mesures concernent les Hautes-Alpes.

Chapitre IX. Limites de la végétation sous le 45.e degré de latitude boréale. (pp. 87-93). Par type de végétations (olivier, vigne, pomme de terre, seigle, mélèze, etc) l'auteur donne les altitudes maximales où il les a observés. La majorité des lieux sont dans les Hautes-Alpes.

Chapitre X. Résultats généraux de mes observations thermométriques. (pp. 93-110). Ce sont des règles générales que l'auteur tire de ses mesures. Les premières règles sont corroborées par les mesures prises dans les Hautes-Alpes.
 
Chapitre XI. Observations relatives aux mesures barométriques. (pp. 111-114). Concernent des mesures prises à la Grande-Chartreuse.

Chapitre XII. Origine des cailloux de la Crau. (pp. 115-120) : Ces cailloux sont originaires du haut bassin de la Durance, dans les Hautes-Alpes.

Précis de la météorologie d'Avignon. (pp. 121-183) : L'auteur donne l'ensemble des relevés météorologiques qu'il a faits à Avignon de 1802 à 1828. Chacun des tableaux est commenté. Les tableaux des pages 129 (température moyenne) et 169 (hauteur de pluie) ont été complétés à la main par les mesures des années 1829 à 1832. S'agit-il de l'exemplaire de l'auteur ? 

Les pages suivantes concernent des sujets variés, que l'auteur a souhaité insérer à la fin de cet ouvrage, sans lien avec les premiers chapitres et le Précis de météorologie. :

Supplément aux Mesures barométriques. (p. 184).
Notice sur les montagnes de la lune. (pp. 184-186).
Eclipse de soleil du 7 septembre 1820 …. (pp. 186-189).
Plus hautes montagnes calcaires des Alpes françaises. (pp. 189-197) : La majorité des montagnes décrites se trouvent dans les Hautes-Alpes et l'Isère : Mont-de-Lans (il explique ne pas être allé aux plus hauts sommets, "se trouvant couverts de glace ou de neige".), Roche-Brune, etc.
Observation relative aux lieux où l'on trouve, dans les Alpes françaises, des coquilles marines pétrifiées. (pp. 198-201).
Bergerie du Mont-Viso (pp. 202-204) : Description d'une nuit dans une bergerie, proche du Mont-Viso, qu'il considère comme la plus élevée d'Europe (1 296 T. - 2 526 m.). Ce texte sera repris, avec une citation de H.-B. de Saussure dans Panorama d'Avignon, de Vaucluse, du Mont-Ventoux et du Col-Longet suivi de quelques vues des Alpes françaises, paru la même année.
Lac d'Allos. (pp. 204-207) : Evocation de ce lac près de Barcelonnette.

Table des matières. (pp. 208-213)

Ouvrages publiés par l'auteur des Mesures barométriques. (une page non chiffrée).

Errata (une page non chiffrée)

(Sans titre) (une page non chiffrée) : Lieux où l'on trouve cet ouvrage.

Cet ouvrage fait l'objet d'une longue notice dans l'autre livre de J. Guérin : Panorama d'Avignon, de Vaucluse, du Mont-Ventoux et du Col-Longet suivi de quelques vues des Alpes françaises, paru la même année. Comme dans la préface de celui-ci, il insiste qu'il privilégie l'observation à la théorie : "Il est rempli d'observations" et "l'auteur en a banni tout raisonnement théorique".

Les problèmes de mesures barométriques devaient préoccuper notre auteur, car il a aussi fait paraître l'ouvrage suivant :
Observations sur le plus ou moins d'exactitude des mesures barométriques prises à de grandes distances du baromètre sédentaire, suivies de quelques recherches sur la pente du Rhône d'Avignon à la mer et sur la pression moyenne de l'atmosphère au niveau de la Méditerranée, Avignon, impr. de Jacquet et Joudon, (s. d.), (BNF : RP- 10280).

Commentaire personnel

Livre attachant où, derrière la sécheresse du propos, on devine la passion de l'observateur, voire même de l'explorateur, qui n'a pas hésité à parcourir en tous sens les Alpes dauphinoises, entrant au cœur du massif  (vallée de la Bérarde, Valgaudemar, Ailefroide, etc), s'approchant des glaciers et dormant même à 2 500 m. d'altitude, comme les futurs alpinistes. L'influence de Saussure, plusieurs fois cité, est sensible. Appliquée au Dauphiné, la démarche scientifique de Joseph Guérin en fait un précurseur des grands explorateurs du Haut-Dauphiné. Cet ouvrage est utilement complété par les quelques vues des Hautes-Alpes que Joseph Guérin donne dans Panorama d'Avignon, de Vaucluse, du Mont-Ventoux et du Col-Longet suivi de quelques vues des Alpes françaises, paru la même année.
Cet ouvrage est très rare.

Références  (Voir : Liste des sources et références)

Notice biographique de Joseph Guérin

Guillemin : 1005
Perret : 2075 : "Précis de physique fondé sur des expériences dans les Alpes".
BNF : V-40912