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PAGE THÉMATIQUE : Exploration du Haut-Dauphiné(Oisans/Ecrins) |
Madame Laugier de Grandchamp, ci-devant Mademoiselle de Gaudin
Description
de la Route de Briançon à Grenoble, par le mont
de Lautaret,
le mont de l'An
& l'Oisan.
in
Almanach des Muses, 1786.
Description de l'exemplaire (Voir : Notes sur la description des ouvrages)
Paris, Delalain, l'ainé, Libraire, in-12 (134r x 82r mm) [20]-304 pp., titre gravé. | ||
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Notes sur l'exemplaire
Pleine basane racinée, dos
lisse orné de fleurons dorés dans des
encadrements dorées, pièce de titre jaune, double
encadrement de filets à froid sur les plats, tranches rouges.
Ex-libris.
Notes sur l'ouvrage
Ce poème de 210 vers est le
premier récit littéraire décrivant la
route de Briançon à Grenoble par le col du
Lautaret, le Mont-de-Lans et l'Oisans. A ce titre, il mérite
d'être
étudié, même si l'abondance des
clichés alourdit le texte. Il se divise en six
parties qui évoquent les différentes sections de
la route (voir une transcription
complète en pdf) :
Briançon
(vers 1 à 22). Cette première partie
introductive ne comporte aucune description. On comprend que l'auteur
quitte Briançon suite au décès de son
mari. Partageant le goût de l'époque pour les
références littéraires, elle rapproche
sa situation de celle d'Adelaïde, la Bergère des Alpes.
Dans ce texte fondateur de la littérature alpestre
édifiante, paru en 1766 dans les Contes moraux,
Marmontel raconte le récit des amours du jeune
Fonrose avec Adelaïde,
aristocratique bergère qui pleure son mari mort. L'action
est située « dans les
montagnes de Savoie, non loin de la route de Briançon
à Modane ». Le mari de la
bergère est d'ailleurs enterré dans une
vallée proche de Briançon. La Bergère des Alpes
est probablement le premier texte littéraire dans lequel
Briançon apparaît (voir la transcription
dans Gallica).
Monêtier-les-Bains (« Monestier ») et le col du Lautaret (vers 23 à 110). Cette longue partie contient plusieurs thèmes, plus descriptifs. Après avoir brièvement évoqué « les eaux salutaires » du Monétier, elle s'extasie sur la beauté de la nature au Lautaret, même si elle cherche « à nourrir une juste douleur ». Dans son évocation du passage du col en hiver, une des pages les plus vivantes du poème, elle rappelle que l'hospice du col avait l'obligation de sonner la cloche les jours de tourmente pour guider les voyageurs. Rare détail précis, elle explique que des piquets sont plantés le long de la route pour tracer le chemin sous la neige. Le poème se perd ensuite dans des considérations où elle oppose la « mollesse » de la vie à Paris à l'aspect imposant de la nature dans la montagne et finit sur une évocation de la théorie de Buffon expliquant que la mer avait auparavant recouvert ces montagnes. La vision de la montagne par Mme Laugier de Grandchamp est indissociable de celle de l'eau : « voyez ces flots hardis, / tomber, se disperser au gré de leurs caprices, / rejaillir dans leur course heurtés par des débris, /& se perdre en grondant au fond des précipices ».
La combe de Malaval (vers 111 à 134). Son
évocation de la Combe de Malaval
égrène rapidement
les clichés littéraires de l'époque
sur la
montagne : « horrible
contrée », «tout m'offre ici
l'image du néant »,
« tout ce qui m'environne, morne &
silencieux, semble un vaste tombeau ». En quelques
vers, elle décrit, ou plutôt elle
évoque, les montagnes. Faut-il y voir la première
évocation littéraire de la Meije et du massif de
l'Oisans ? :
Auris-en-Oisans (« Oris ») (vers 135 à 145). Dans cette courte description, elle oppose la riche agriculture de ces « côteaux » aux « antres odieux » de la combe de Malaval : « fruit des exploits laborieux / des habitans de vos villages ».
Le château de Vizille (vers 146 à 159). Elle compare le passé glorieux du château, et de son illustre possesseur Lesdiguières, à l'usage qu'en fait « un simple Commerçant, utile à la patrie» qui l'occupe actuellement. Il s'agit de la famille Périer qui utilisait ce château comme manufacture d'indiennes.
Le
Grésivaudan
(« Grézivaudan ») et
l'arrivée à Grenoble (vers 160 à 210).
Après toutes les émotions de la montagne, ces
riches vallées qui convergent vers Grenoble
amènent un repos salutaire à l'âme
tourmentée de notre auteur. Probablement qu'elle
étend le Grésivaudan à la plaine qui
précède Grenoble depuis Vizille, ce qui n'est
plus le nom qu'on lui donne aujourd'hui.
Le texte se trouve aux pages 73 à 80 de l'Almanach des Muses, 1786.
Une courte analyse de ce texte est donnée dans La littérature
alpestre en France et en Angleterre aux XVIIIe
et XIXe
siècles, de Claire-Eliane Engel,
Chambéry,
1930, pp. 31 et 32 (voir aussi bibliographie p. 266).
« Quelques esprits auxquels la passion de
l'imitation donnait une sorte de hardiesse, tentèrent de
découvrir le Dauphiné. Mme Laugier de Grandchamp
explora en vers la route de Briançon à Grenoble.
Partagée entre ses goûts personnels, qui lui
faisaient haïr les « lieux
sauvages » des abords du Lautaret, et ses
modèles littéraires qui lui ordonnaient de les
admirer, elle choisit le compromis habituel, parla de la
Bergère des Alpes, condamna les sommets et vit dans les
vallées les « délicieux
azyle » de l'Age d'Or ».
Une deuxième édition de ce texte à
été donnée dans :
Recueil amusant de
voyages, en vers et en prose ; faits par différens auteurs,
auquel on a joint un choix des Epîtres, contes &
fables morales qui ont rapport aux voyages
[publiés par L.-P. Couret de Villeneuve, L.-P.
Bérenger et autres], Paris, Nyon
l'aîné, 1787, T. VII, in-32, pp. 348-357
Il existe une description contemporaine
de la route
de Grenoble au Galibier, en passant par Vizille, Bourg d'Oisans, La
Grave et le Lautaret, écrite par Colaud de la
Salcette en
1784 et publiée seulement en 1889 par A. Masimbert. Ce
récit de voyage est beaucoup plus précis et
beaucoup plus
intéressant à lire. Voir la notice complète
qui lui est consacrée sur ce site.
L' Almanach des Muses,
1786 comprend :
- faux titre et titre gravé.
- 16 pages non chiffrées contenant un avertissement de
l'éditeur, un calendrier et autres informations.
- Almanach des Muses,
Ou choix de Poésies fugitives de 1786. (pp.
1-264). Il 'agit d'un recueil de poésies. On trouve peu
d'écrivains encore connus. On relève les noms de
François de Neufchâteau, le chevalier de Piis,
Voltaire. Les pages 250-259 contiennent une table. Cette partie se
termine par deux mélodies, dont une de Grétry
(pp. 260-264).
- Notice sur tous les
ouvrages de Poésie qui ont paru en 1785. (pp.
265-304). Cette notice concerne non seulement les ouvrages de
poésies à proprement parler, mais aussi les
périodiques et les pièces de
théâtre. Le
Mariage de Figaro de Beaumarchais est
annoncé aux pages 286-289.
L'Almanach des Muses
est un almanach de poésie avec une petite partie critique,
édité chez Delalain de 1765 à 1794 et
chez Louis, à Paris de 1795 à 1808. L'Almanach des Muses
a paru jusqu'en 1833, formant une collection de 69 volumes. Il a
été publié par Claude-Sixte Sautreau
de Marsy
(1765-1793), assisté par Joseph Mathon de La Cour
(1766-1769) et Étienne Vigée (1778-1793), puis
par Etienne Vigée (1794-1820), Justin Gensoul (1821-1829) et
enfin Pierre-Jean Lesguillon (1830-1833).
Le premier volume (1765) a fait l'objet d'une 2e
édition augmentée chez Delalain en 1769.
Plusieurs volumes ont aussi fait l'objet de tirages
différents. Il a été
complété en 1781 par : Pièces
échappées aux XVI premiers Almanachs des Muses,
Paris, veuve Duchesne, 1781.
Jusqu'en 1794, il contient un titre gravé pour chaque
volume, dessiné et gravé par Poisson,
à l'exception de celui de 1785, dessiné et
gravé par Huet. Quelques-uns ne sont pas signés.
A partir de 1795, jusqu'en 1804, il contient un frontispice. Dans
cette série, ils ont été
dessinés par Bornet, Chaillou, Maréchal, Monnet
et Queverdo, et gravés par Baquoy, Delvaux, Dien et
Noël. Enfin, de 1807 à 1827, il contient
une titre gravé et parfois un frontispice gravé.
Références bibliographiques :
Grand-Carteret, 377
Cohen, Bibliographie
des livres à vignettes du XVIIIe
siècle,
1880
Bibliographie sommaire
de l'Almanach des Muses (1765-1833), par
Frédéric Lachèvre, Paris, 1928.
Commentaire personnel
Il faut tout l'amour que je porte à "mes" montagnes pour m'astreindre à lire, puis à analyser, une œuvre aussi ennuyeuse. Mais c'est, pour ainsi dire, un incunable de la découverte du Haut-Dauphiné. A ce titre, il mérite toute notre attention, et même un peu de notre ferveur bibliophilique !
Références (Voir : Liste des sources et références)
Notice biographique de Mme Laugier de Grandchamp
Texte
complet (en pdf) du poème.
Maignien (Catalogue) : 16036 : pour la
deuxième édition
BMG : V.4781, pour la deuxième édition
Almanach des Muses
: plusieurs références à la BNF.