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PAGE THÉMATIQUE : Dialectes et patois du Dauphiné |
[Blanc la Goutte]
Grenoblo malherou, suivi du Dialoguo de le quatro comare.
Description de l'exemplaire (Voir : Notes sur la description des ouvrages)
[Grenoble,
Courreng, Libraire], s.d. In-8° (213 x 138 mm), 26-[2] pp. |
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Notes sur l'exemplaire
Cartonnage bradel percaline verte du XIXe siècle, titre doré.
Exemplaire
des bibliothèques d'Henri Maillefaud, avec son
ex-libris sur le premier contre-plat (voir ex-libris
dauphinois) et de Daniel Mourral, avec son ex-libris sur la
page de garde (voir ex-libris
dauphinois). Daniel Mourral était le neveu d'Henri
Maillefaud.
Mentions manuscrite sur une page de garde : « Copie
de
Courreng » et « Inondation de
Grenoble
1733 »
Notes sur l'ouvrage
Nouvelle édition de ces célèbres poèmes en patois de Grenoble, par le libraire "Courreng", de Grenoble.
Le poème anonyme Grenoblo
malhérou a
été écrit par Blanc la Goutte
après une inondation brusque et catastrophique qui
dévasta Grenoble les 13 et 14 septembre 1733. Ce
poème est écrit en langage grenoblois, qui est
appartient
à la famille du franco-provençal.
La première
édition est :
Grenoblo malherou. A
Monsieur ***, Grenoble, André Faure, 1733,
in-4°, 26 pp.
Une deuxième
édition est donnée dans un recueil des
poésies de Blanc la Goutte. Il contient aussi la
première édition d'un
poème, toujours en langage de Grenoble : le Jacquety de le Comare
:
Recueil de
poésie en langage
vulgaire de Grenoble, contenant l'Epitre à Mademoiselle ***,
sur
les réjouissances à l'occasion de la naissance de
Monseigneur le Dauphin, Grenoblo malherou et le Jacquety de le Comare,
Grenoble, André Faure, s.d. [ca. 1740], in-8°, 36 pp.
Ce deuxième
poème, aussi connu sous le titre de : Dialoguo de le quatro comare,
accompagnera en général toujours le Grenoblo malhérou.
Ces deux éditions sont rares.
Ensuite, au début du XIXe siècle, il y eut quatre éditions par des imprimeurs ou libraires grenoblois, toutes sans date : Giroud (voir notice), Cuchet, une édition sans lieu ni nom et enfin cette édition imprimée pour le libraire Jean François Courenq, fils.
En effet, cette plaquette
porte l'adresse de Courreng (sic),
Libraire, au Jardin de la ville. Sous la Restauration, il existait
à Grenoble un libraire du nom de Jean François
Courenq,
fils, dont on trouve plusieurs ouvrages :
- Catalogue du nouveau
cabinet littéraire de Courenq fils, libraire place St
André, au palais, Grenoble, 1819 (BMG :
O.10302, Dauphinois)
- Cahier de bagues,
Grenoble, Se vend chez Courenq marchand libraire sous la
voûte du
jardin (BMG : O.7073)
- Le Nouveau
Secrétaire de la
cour de France, contenant 1° l'art épistolaire ;
2° des
modèles de pétitions... 3° des
modèles de
lettres... Troisième édition. On
trouve à
la BNF 5 exemplaires, tous de la 3e
édition, avec l'adresse
:
Grenoble, Coureng fils, et les dates de 1824, 1829, 1830, 1832 et 1838.
Il s'agit d'une impression de qualité médiocre. Il n'y a pas de faux titre et la page de titre ne porte aucune autre indication que le titre. L'adresse se trouve au pied de la dernière page. L'ouvrage se termine par un feuillet blanc. L'état d'usage de cet exemplaire est celui de ce type de publications populaires, beaucoup manipulées et imprimées sur du papier de médiocre qualité.
Le Grenoblo malherou et le Jacquety de le Comare (ou Dialoguo de le quatro comare) ont souvent été cités ou réimprimés ensemble dans des ouvrages sur les patois du Dauphiné.
P.-V. Chalvet, dans son édition de la Bibliothèque du Dauphiné, de Guy Allard ne connaît pas Blanc la Goutte. Il faut attendre la première étude sur le parler dauphinois pour qu'une place lui soit faite. J.-J. Champollion-Figeac, dans ses Nouvelles recherches sur les patois ou idiomes vulgaires de la France et en particulier sur ceux du département de l'Isère, parues en 1809, consacre quelques pages au poète : "Mort depuis plusieurs années, [il] a laissé parmi ceux qui l'ont connu une réputation que ses saillies, ses bons mots, son humeur joviale et sa gaieté constante au milieu de ses infirmités lui conserveront long-temps encore." (p. 98). Sur le Grenoblo Malhérou et la Coupi de la Lettra, il y trouve "un intérêt soutenu par une grande facilité de composition, et par un bon choix de détails et d'expressions assaisonnées d'un peu de critique." (p. 98). En revanche, il passe rapidement sur le Dialoguo, qu'il n'attribue pas encore à Blanc la Goutte. Les seuls textes reproduits dans son ouvrage sont l'Epître en vers, au langage vulgaire de Grenoble, sur les réjouissances qu'on y a faites pour la naissance de Monseigneur le dauphin, à Mademoiselle***, qu'il qualifie comme "une des meilleures [pièces] de notre littérature indigène." (pp. 131-146) et la Coupi de la lettra (pp. 103-109).
Ensuite, le premier recueil de textes en patois dauphinois : Poésies en langage patois du Dauphiné, Grenoble, Prudhomme, 1829, publie le Grenoblo Malhérou (pp. 1-18), suivi du Dialoguo (pp. 19-26), qui reste toujours anonyme.
Paul
Colomb de Batines, dont on connaît
l'intérêt pour le patois du
Dauphiné,
entreprend
de publier un ouvrage plus ambitieux et plus complet sur ce sujet,
précédé par une préface. Il
y a deux
éditions,
- Poésies en
patois du Dauphiné, Grenoble, imprimerie de
Prudhomme, 1840
- Poésies en patois du
Dauphiné, deuxième édition revue et
augmentée, Grenoble, A. Merle, 1859
La préface ne donne que quelques renseignements
bibliographiques sur les deux poèmes, mais l'auteur du Dialoguo, n'est
toujours pas identifié. Comme Champollion-Figeac,
il pense qu'il a paru avant le Grenoblo
Malhérou. Les deux poèmes sont
reproduits (édition de 1859) : Grenoblo malhérou
: pp. 19-40 et Dialoguo
de le quatro comare : pp. 41-50.
L'année 1859 est riche en événements pour ces poèmes. En effet, suite aux inondations catastrophiques de cette année-là, J.-J-.A. Pilot de Thorey publie une étude Grenoble inondé, Maisonville père et fils, 1859. Parmi les nombreuses pièces recueillies dans cet ouvrage, il y a une publication du Grenoblo malhérou (pp. 31-53), annoté et suivi par une Notice sur Blanc la Goutte (pp. 54-59). C'est la première étude sérieuse sur le poète, qui contient de nombreux renseignements biographiques ainsi qu'une bibliographies complète. Pilot de Thorey est le premier qui attribue indubitablement le Dialoguo à Blanc la Goutte. Dans le même ouvrage, sont publiés avec des notes la Coupi de la lettra (pp. 73-80), première publication depuis l'ouvrage de Champollion-Figeac, et le Dialoguo (pp. 85-93). Pour la première fois, les trois textes se trouvent rassemblés, avec un appareil critique.
La même année, Diodore Rahoult et E. Dardelet lance la publication par livraisons du Grenoble Malhérou, magnifiquement illustrée par D. Rahoult. La dernière livraison est disponible en 1864, formant l'ouvrage : Poésies en patois du Dauphiné, Grenoble, Rahoult et Dardelet, Editeurs, 1864, illustrée par D. Rahoult, avec une préface de George Sand. Il sera suivi en 1874 par Poésies en patois du Dauphiné, Grenoble, Rahoult et Dardelet, Editeurs, Baratier Fres et Dardelet, Libraires, 1874 avec la publication de la Coupi de la lettra et du Jacquety de le comare, qui, pour l'occasion, retrouve son titre originel.
Ces poésies ont aussi été
publiées par Jean Lapaume, selon une orthographe rétablie par ses soins, dans :
Anthologie nouvelle autrement
Recueil complet des poésies patoises des bords de
l'Isère. Tome IVe et
dernier,miscellanées,
Grenoble, Prudhomme, Giroud et Cie, 1866 (autre édition en 1878). Dans le Commentaire
de ces ouvrages, J. Lapaume critique l'édition des
poèmes de Blanc la Goutte dans les éditions
précedentes, celle de Dardelet (1864), ainsi que
dans Grenoble
inondé et Poésies
en patois du Dauphiné
(édition de 1859). Il considère ces
éditions comme
fautives et apporte de rectifications en s'appuyant sur les
règles d'orthographes et d'étymologies du
dialectes
grenoblois. Il ne donne malheureusement pas clairement les principes
sur lesquels il se fonde pour cela. Le meilleur exemple est qu'il
privilégie l'orthographie malheirou,
plutôt que les deux formes habituellement
utilisées : malherou
ou malhérou,
en affirmant que « le patois n'emploie
jamais d'accents
dans le corps des mots. » (p. 493). D'où
tire-t-il
cette règle ?
Dans cette étude sur le texte, J. Lapaume ne
renvoie jamais
à l'édition originale du poème. Je
pense qu'il
devait aussi la trouver fautive. Il applique aussi des corrections au Dialoguo de le quatro comare
et à la Coupi
de la lettra. Pour finir, il juge
sévèrement Blanc la Goutte,
en le
situant en bas de la hiérarchie des poètes
patoisants
grenoblois, loin derrière Laurent de Briançon et
Jean
Millet. Il lui reproche la forme de son poème, en ne lui
trouvant aucune qualité littéraire. Curieusement,
et non
sans injustice, il attribue cela au manque d'études
libérale ou humanités de l'auteur. En effet, il
ne trouve
aucune des formes classiques à ce poème
(épopée ou épître) et fait
même appel
à Boileau pour le juger. Aujourd'hui, à la
différence de J. Lapaume, le charme et
l'intérêt
que nous trouvons à ce poème proviennent
justement de ce
que lui reproche notre critique, c'est à dire sa
liberté
de forme et sa fraîcheur populaire. Il n'est donc pas
étonnant qu'il égratigne aussi G. Sand, qui, dans
sa
préface à l'édition
illustrée tant
décriée par J. Lapaume, avait pourtant bien
compris tout
ce que l'on peut tirer de ce texte « digne
d'être
entendu et goûté de toute la
France ».
Le
Grenoblo malhérou et
La Coupi de la lettra
ont été réimprimés
à l'identique à partir de l'édition de
Rahoult et Dardelet :
Grenoble, Editions Dardelet, 1966, in-4° (315 x 238 mm),
IX-135-21 pp., reliure d'éditeur, jaquette.
On peut aussi signaler cette
édition :
Poésies en
patois du Dauphiné, Grenoblo malhérou,
Grenoble, Maisonville, 1883, in-8°, 47 p.
Depuis, à notre connaissance
et hors les
réimpressions des ouvrages précédents,
la
dernière publication des poèmes est
l'édition des œuvres complètes
de Blanc-la-Goutte :
Blanc la Goutte,
poète de Grenoble, œuvres complètes,
présentées et traduites par Gunhild
Hoyer & Gaston Tuaillon, Grenoble, "Le Monde Alpin et
Rhodanien", année 2002, 4e trimestre.
C'est la meilleure étude
récente, avec un riche appareil critique. Les
poèmes sont tous accompagnés d'une traduction en
français.
Pour revenir
à l'édition originale de 1733, dont les
exemplaires sont très rares, signalons que le catalogue
de la vente Génard en proposait un,
relié en
maroquin par Chambolle-Duru (n° 294) :
« Rarissime
édition originale de ce charmant poème patois qui
manque
à la plupart des collections
dauphinoises ». Il
contient une lettre signée De Lorme, indiquant que cet
exemplaire « est le premier qui sort de
chés
l'imprimeur ». Il a été
représenté à la vente
Génard de mai
1886 sous le
n° 67 et adjugé 67 fr.
Il est passé en vente
à Grenoble le 16 octobre
2000
(n° 161) et a été vendu 4 500 fr. (686
€), avec
les ex-libris des bibliothèques Couturier de Royas et
Génard.
Dans sa plaquette, Le poète François Blanc dit Blanc-la-Goutte, Grenoble, 1907, G. Vellein cite cet exemplaire et le fait qu'il soit passé en vente deux fois, mais il ne tranche pas sur le fait de savoir si c'est le même exemplaire ou deux exemplaires différents. Il signale que lors de la première vente, l'exemplaire a été acheté par Albert Ravanat, libraire à Grenoble, pour 220 frcs. C'est en s'appuyant sur le contenu de la lettre jointe à cet exemplaire que A. Ravanat a remis en cause les conclusions de Pilot en Thorey, en avançant qu'André Blanc était l'auteur des poèmes, en lieu et place de François Blanc. Les informations de cette lettre ont été reprises par Vicaire dans sa notice sur l'édition de 1864 (I, 812-813) et, depuis, par tous les catalogues de libraires.
Commentaire personnel
A défaut de posséder un exemplaire de l'édition originale, c'est un plaisir de posséder ce rare texte, dans son jus, comme un témoignage de cette littérature populaire qui n'avait pas encore été "annexée" par le savoir savant.
Références (Voir : Liste des sources et références)
Notice biographique de Blanc la Goutte
Références pour
l'édition "Courreng" :
Bibliographie de Grenoble
inondé, p. 58
Rochas : I, p. 142 : II
Maignien (anonyme) : 1070
Perrin : 85
SdB : 588 (5 fr.)
Un seul exemplaire au CCFr : Bibliothèque municipale. Rouen,
Seine-Maritime : Mt Br 19810, Fonds Cas (absent de la BNF et de la
BMG).